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De la graine de mangemort (espion) ft. Sirius

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Maugrey, dans mon bureau.

L’interpelé se raidit. Il déteste entendre cette combinaison de mots. Elle pue les ennuis et il est presque certain de n’avoir rien fait. Enfin, récemment. Enfin… Ça mérite une ou deux secondes de réflexion quand même, le temps qu’il se lève pour tirer sa carcasse jusqu’au bureau étriqué de son patron. Lui, au moins, il a des murs. Les simples aurors comme lui doivent se débrouiller avec des bureaux entassés anarchiquement dans une pièce à l’ambiance un peu glauque. Entre les photos de crimes odieux sur les murs, les dossiers, les pistes à suivre, les liens à faire dans la traque des Mangemorts… Son regard se perd le long d’un filin rouge puis il s’oblige à se focaliser sur sa supérieure.
Le genre de femme qui mérite sa place, aucun doute là-dessus. Si Voldemort a deux sous de jugeote, il ira se planquer avant de tomber dessus. Maugrey aimerait bien se trouver un coin tranquille où elle ne l’engueulera pas.

Il analyse son visage, ses traits encore fermes de cinquantenaire dynamique. Une cicatrice lui barre la joue, la défigure, mais son charme se situe ailleurs. Enfin, si on a le courage d’aller voir ailleurs. Pour une fois, Maugrey préfère garder son pantalon sur ses hanches, merci bien.

C’est pas moi.
Elle arque un sourcil, soupçonneuse.
De quoi ?
Euh… Rien. Alors, quoi de beau cheffe ?

Il ne s’assoit pas, préfère rester debout près de la porte. On ne sait jamais.

J’ai besoin que vous formiez un nouveau. Un élément prometteur.

Maugrey soupire, ne l’écoute plus que d’une oreille. Il en a marre de devoir se battre à chaque fois qu’il lui prend une folie d’autoritarisme. D’accord, ils vivent une situation de crise et sont plus ou moins en guerre mais justement, est-ce que c’est le bon moment pour lui coller un boulet dans les pattes ? Question rhétorique, il connait la réponse : non. Il a autre chose à faire que du baby-sitting. Malheureusement, il entrouvre à peine les lèvres pour entamer sa plaidoirie qu’elle lève la main pour le réduire au silence.

Il s’agit de Sirius Black.

Ricanement moqueur. Black. Sang-pur. Famille traditionaliste. De la graine de Mangemort, d’espion, pire ! De Mangemort espion.

Et comme je sais ce que vous êtes en train de vous dire, c’est justement pour ça que je vous le confie à vous.

Soupçonneux, Maugrey cherche l’embrouille. Ça ressemble quand même à de la manipulation et c’est typique de sa cheffe : lui donner l’impression qu’elle lui confie une mission cruciale alors qu’elle l’entube. Il roule des yeux, se passe la main dans ses cheveux blonds foncés.

Bon et je commence à lui torcher les fesses quand, au chiard ?

Trois coups secs contre le battant de la porte close répondent à sa question.
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Whatever It Takes

 
Sirius Black  ϟ  Alastor Maugrey

Sirius ne tenait plus en place, il était excité comme une puce. Déjà un an qu'il rongeait son frein enfermé dans ces salles du Ministère. Il n'était définitivement pas fait pour rester en place. Malgré ses  jérémiades incessantes sur le fait qu'il ne se sentait pas utile, il avait appris un nombre incalculable de sortilèges cette dernière année. S'il était naturellement doué avec sa baguette, le gamin présentait de sérieux problèmes avec l'autorité. Rester tapis dans l'ombre. Attendre et obéir aux ordres. Ne pas faire preuve d'insolence envers ses aînés. Respecter leurs décisions et ne pas en faire qu'à sa tête. Y avait pas à dire Sirius avait encore beaucoup à apprendre. Il était d'ailleurs souvent convoqué dans le bureau de la Cheffe des Aurors à la suite d'une de ses frasques. Mais aujourd'hui, s'il était convoqué dans le bureau, ce n'était pas pour se faire remonter les bretelles. Non. Aujourd'hui, enfin, on le plaçait en binôme avec un Auror plus âgé pour commencer la deuxième phase de son apprentissage.

Le sourire aux lèvres, il tapait le sol du pied, ne pouvant refréner davantage son excitation, tout en fixant l'horloge. Il avait rendez-vous à 9h11 précise dans le bureau et son impatience était à son comble. Il avait hâte de connaitre le nom de son binôme. On avait beau lui avoir répété que les premiers mois ne seraient consacrés qu'à de l'observation avant que progressivement, une fois que son mentor le considérait comme prêt, il puisse se rendre sur le terrain, lui, n'avait qu'une envie : commencer. Et vite.

Et pour être tout à fait honnête, il nourrissait l'espoir que son mentor serait un Auror cool, qui verrait en lui ses capacités exceptionnelles et l'emmènerait rapidement sur le terrain. Seul un Auror complètement fou agirait de la sorte, mais Sirius était bien trop confiant en ses capacités et minimisait le danger. Enfin l'heure tant attendue arriva. D'un pas rapide il se précipita vers le bureau de la Cheffe et frappa avec force contre le bois de la porte. Sirius patientait difficilement qu'on l'invite à rentrer avant de pousser cette porte et rejoindre les deux individus qui se faisaient face. Son sourire se décomposa un instant en voyant que celui qui faisait face à la Cheffe n'était nulle autre que Maugrey avant de sourire de plus belle. S'il était considéré comme un élément borderline, il n'en restait pas moins l'un des meilleurs éléments du bureau. Et compte tenu qu'il souhaitait aller sur le terrain au plus vite, avoir pour mentor l'Auror qui respectait le moins les règlements, malgré son sale caractère légendaire, était tout bénéfique pour lui. « Sirius, au rapport Cheffe » lança le gamin, le sourire insolent glissé sur ses lèvres en guise de préambule.

« Pour une fois, vous êtes à l'heure » lança la Cheffe du bureau des Aurors après avoir levé les yeux aux ciels face à son introduction. « Voici votre mentor, Auror Maugrey, en espérant qu'il vous mettra un peu de plomb dans la cervelle. » Sirius réprima son envie de rire en se mordant l'intérieur de la joue, il souhaitait faire bonne impression et ne pas se faire rétrograder. Aussi, il préféra ne pas argumenter et, avec entrain, demanda davantage à Maugrey qu'à la Cheffe : « trop cool, on commence quand ? ». C'est pourtant cette dernière qui lui répondit, le laissant au bon soin de son nouveau mentor. « Votre deuxième phase d'apprentissage commence maintenant jeune homme. La suite ne dépendra que de l'Auror Maugrey, qui s'adaptera en fonction de votre progression. Bien, vous pouvez disposer tous les deux. » Se tournant vers son mentor, Sirius attendait ses ordres pour lui emboîter le pas.

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Maugrey jure en continu dans sa tête pendant que le gamin entre dans le bureau de la cheffe. Sérieusement. Pourquoi lui ? Pourquoi ? Monde cruel. Ingratitude bureaucratique. Sirius Black lui donne l’impression d’un petit chiot tout content à l’idée de commencer à jouer. Sauf qu’il va vite déchanter.

M’lu, marmonne quand même le mentor contraint et force.

Il le détaille physiquement. Belle gueule (comme lui), aussi noir de cheveux qu’il est blond (coïncidence ?), une aura de confiance en lui (bah tiens). Maugrey a l’impression de se regarder dans un miroir avec dix ans de moins et ça l’énerve. D’autant plus qu’il voit à la tronche de sa cheffe que c’est précisément la raison pour laquelle il est là, dans ce bureau, à devoir se le coltiner. Retour de bâton. Il a une pensée pour son propre mentor et se demande s’il ne devrait pas tenter de lui refiler le jeune Black. Et puis non. Il préfère surveiller lui-même la graine de Mangemort.

Quand la cheffe les congédie, Mini-Black le regarde avec de grands yeux dans l’attente qu’il lui donne un ordre. Maugrey a presque envie de tenter un « assis » mais il se retient au dernier moment, se contentant d’un geste de la tête pour l’inviter à le suivre.

Bon…

Le mentor malgré lui se passe la main dans les cheveux et se demande par où commencer. Ce n’est pas son premier apprenti mais il avait pu choisir le dernier. Il savait pourquoi il se le trainait dans les pattes. Il parcourt la pièce du regard puis désigne son bureau –un espace rectangulaire encombré de parchemins. Il prend sa longue veste en peau de dragon (protection optimale contre les maléfices !) marron et l’enfile.

On va faire un tour, besoin d’prendre l’air.

Il n’a surtout pas envie qu’on écoute ce qu’il a à dire par-dessus son épaule. En théorie, il doit garder le chiard au bureau pendant des mois et lui confier des tâches idiotes mais il préfère le tester tout de suite pour vérifier ce qu’il a dans le ventre. Évidemment, il est possible que Sirius Black se blesse gravement ou meurt mais bon. Les accidents arrivent. Tous les deux sortent du bureau des aurors et Maugrey ne prononce pas un mot, concentré sur sa destination dont il n’a, pour l’heure, aucune idée. Avant que sa cheffe ne l’appelle, il relisait les détails d’un dossier concernant une agression dans l’allée des embrumes. Enfin, à l’entrée de l’allée. Et ce qu’on supposait être une agression puisque le pauvre libraire de chez Fleury & Bott avait retrouvé une oreille ensanglantée sur son chemin. L’allée des embrumes, en voilà une riche idée ! se félicite l’auror. Autant entrer immédiatement dans le vif du sujet.

Une fois hors du Ministère, Maugrey attrape le poignet de Sirius et transplane sans crier gare pour apparaître dans la ruelle la plus proche du Chaudron Baveur. Il est curieux de voir si le gosse va vomir. Dans le doute, il se décale d’un pas de côté.
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Whatever It Takes

 
Sirius Black  ϟ  Alastor Maugrey

Sirius attendait les ordres de son nouveau mentor. Il avait hâte de rentrer dans le vif du sujet, de se rendre enfin utile. La traque des mangemorts revêtait pour lui une importance particulière.  Même s'ils étaient méconnaissables sous leurs masques, Sirius connaissait bon nombre d'entre eux pour les avoir croisé lors de soirées mondaines où il était traîné par ses parents en sa qualité d'héritier. Aujourd'hui, il n'était plus que le mouton noir. L'enfant déshérité et renié, haï profondément par ses parents. Et il leur rendait les sentiments, voir même davantage encore, les trouvant méprisables. Il avait eu quelques réflexions quant à son nom de famille à son arrivé au Ministère. Des réflexions grotesques quand on connaissait le beau brun et ses convictions. Il avait même rejoint l'Ordre du Phœnix, se battant sur tous les fronts pour faire tomber ceux qui se disaient partisans de Lord Voldemort.

Le garçon emboîta le pas de Maugrey pour sortir du bureau de la cheffe sans rien ajouter de plus. S'il se contenait que difficilement, il n'était pas fou pour autant l'étudiant. Il allait rester deux ans sous ses ordres et lui seul déciderait des missions auxquelles il pourrait participer, alors il comptait bien se tenir à carreaux, tout du moins, aussi longtemps qu'il le pourrait. Sirius se demanda un instant si par le passé dans le bureau, on avait retiré un étudiant à son mentor, soit parce que ça se passait mal, soit parce que l'étudiant s'était plaint de ne rien apprendre. Etre bloqué sur la paperasse était la pire hantise de l'aristocrate qui préférait nettement l'action.

A son plus grand contentement, Alastor ne semblait pas vouloir l'enfermer entre quatre murs. A peine ils avaient rejoint le petit espace dédié à l'Auror que ce dernier lui annonçait sans transition, qu'ils sortaient prendre l'air. « Avec plaisir ! » lâcha d'étudiant avec un entrain visible, ravi de la tournure que prenait les évènements. Sirius avait beau être un garçon d'action, qui agissait avant de réfléchir, il observait beaucoup et notait les moindre détails. Vestige de son enfance où il n'avait pas le droit de faire bien plus que rester assis, sage à écouter les gens. Le gamin avait alors appris à écouter et observer afin d'utiliser ces nouveaux éléments contre ses parents par la suite. Talent très apprécié en ces temps sombres. S'il se plaisait à penser que c'était pour ses talents en sortilèges que le garçon avait été recruté au bureau, nul doute que ses connaissances sur la bourgeoisie et plus particulièrement sur ceux suspectés d'être mangemort était un atout non négligeable qui avait conduit à l'acceptation de sa candidature.

Pour l'heure, il n'y pensait pas, concentré sur l'instant et sur la veste que son aîné était en train d'enfiler et qui lui donnait envie. Elle semblait être faite en peau de dragon, matière résistante qu'il connaissait pour avoir eu des gants pour la botanique à l'école. Elle était sûrement bourrée de protection et le gamin se promit deux choses alors que Maugrey interrompait le file de ses pensées. La première était de la questionner à ce sujet et la seconde de s'en procurer une semblable, car définitivement, Maugrey était stylé avec cette veste sur le dos. Il emboîta à nouveau le pas à son aîné, ignorant totalement leur destination. Même s'il voulait d'envie de le savoir, de peur que son mentor ne change d'avis, le garçon garda les lèvres closes et suivait avec entrain le chemin que prenait l'Auror.

Ils sortirent enfin du bâtiment souterrain et sans même le prévenir, Sirius sentit son poignet être agrippé et ce sentiment bien connu du transplanage envahir son être. Dans un pop sonore ils réapparurent dans une petite ruelle bien connue des sorciers car elle permettait d'arriver aux alentours du Chaudron Baveur par transplanage sans être repéré par les moldus. Habitué depuis sa tendre enfance aux divers moyens de déplacement sorciers Sirius ne ressentait aucun désagrément suite à ce transplanage pourtant brutal. Ce qui ne voulait pas dire qu'il n'était pas moins vexé d'être embarqué de la sorte, tel un enfant qu'on promène ici et là. Les lèvres crispées il essaya de ne pas paraître trop sec sans grand succès quand il notifia à l'Auror son mécontentement d'être traité ainsi. « J'ai mon permis hein et je connais cette ruelle » continuait le garçon qui balayait des yeux le lieux traquant le moindre mouvement qui pourrait annoncer qu'ils n'étaient pas seuls. « Je pouvais transplaner ici pour vous rejoindre. » Il se retient de justesse d'ajouter que la prochaine fois il n'avait qu'à lui demander. Mais le risque qu'il n'existe pas de prochaine fois le fit se contenir et attendre des explications du trentenaire plutôt que continuer sur des reproches.

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Maugrey se demandait comment égratigner le bel enthousiasme de son nouvel élève. Il connait pas mal d’informations à son sujet mais il préfère se faire sa propre opinion. D’accord, Dumbledore l’a laissé rejoindre l’Ordre… Mais l’auror n’y voit pas une marque de confiance pour autant. La preuve, il l’a convié, lui aussi, et Maugrey se connait très bien lui-même, merci bien. Il connaît surtout ses méthodes. Peut-être que le jeune Black espionne pour le mage noir. Probablement, même. On ne se méfie pas assez des petits jeunes zélés. Dans l’esprit vaguement paranoïaque du traqueur, toute cette histoire avec sa famille qui le rejette est un vaste plan tordu d’infiltration et il se fait un devoir de le déjouer.

En attendant, il va le tester. Raison pour laquelle il l’embarque pour enquêter sur cette histoire d’oreille. Évidemment, qu’il sait qu’il a son permis. Dans le cas contraire, il n’aurait même pas pu entrer à la formation des aurors. Tout comme il se doute qu’il connait cet endroit-là. Qui ne le connait pas, dans leur monde ?

C’est vrai, tu aurais pu. Et t’emmerde pas à me balancer des évidences parce que ça fait partie de ta première leçon, gros malin. Si j’avais été un ennemi, j’aurai pu t’emmener n’importe où pour te torturer. Ou juste te tuer, si t’es un p’ti chanceux. D’emblée, t’as décidé que tu me faisais confiance, parce que la cheffe t’as collé dans mes pattes. Mais tu sais rien sur moi, hormis ce que t’as pu entendre. Alors entre toi dans le crâne la plus grande règle de ce monde pourri : VIGILANCE CONSTANTE !

Il a aboyé les deux derniers mots à la face du môme qui ne l’est pas tant que ça. Parfois, Maugrey oublie qu’il a trente-deux ans. Il se sent beaucoup plus vieux dans sa tête.

Ce qui implique de ne faire confiance à personne que tu n’as pas personnellement testé. Ça vaut pour la hiérarchie. Établis une limite claire. J’suis ton chaperon pour les années à venir, méfie-toi de moi. Pas parce que je suis dingue, parce qu’on se connait pas. Invente tes propres tests pour définir si tu peux me faire confiance ou pas. Et sois pas trop coulant, c’est comme ça qu’on crève bêtement. Ramène ton cul, maintenant, on a du boulot. T’as rien contre les bouts de corps ? embraie-t-il spontanément comme s’il ne lui avait pas balancé une longue tirade juste avant.

Dans la foulée, il pénètre dans le Chaudron Baveur pour rejoindre l’entrée du Chemin de Traverse. À cette heure-ci, il n’y a que ceux qui cuvent de la veille. Maugrey adresse un signe de tête au patron et ne traine pas. Aucune envie qu’on l’interpelle ni de taper la causette.
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Sirius Black  ϟ  Alastor Maugrey

La douche froide. Lui qui avait hâte de faire ses preuves. Lui et son arrogance, sa confiance infinie en ses capacités. Que dalle. Envolés. Balayés. En deux phrases. Oh il était fort son tuteur, il avait réussi là où tout le monde avait échoué. Il avait fait taire le beau brun, il lui avait coulé le bec et bien fort. Heureusement que Sirius s'était retenu dans ses propos, qu'il n'avait pas fait encore plus le malin bien qu'il en brûlait d'envie. La chute était déjà douloureuse. Elle aurait sans doute été pire encore.

Échec et mat. Non, pas question. Il l'avait maté, oui. Mais ça serait la première et uniquement fois, il s'en faisait la promesse. Ça ne se reproduirait plus jamais. Ça faisait mal. Ça piquait. Mais Sirius se força tout de même à ravaler sa fierté et se murer dans le silence. Parce qu'il avait raison, dans le fond. S'il avait été un ennemi... ll ne serait sans doute plus de ce monde. Lui qui d'habitude prenait tout à la rigolade se prenait un grand coup dans la figure, alors que son désormais tuteur continuait à déverser sa verve sur lui.

Il s'était fait avoir comme un bleu. Comme un débutant. Lui qui détestait pourtant ce terme, qui se croyait tant avancé sur son âge et sur la formation, au-dessus de tout ça. Pas du tout. Loin de la même. L'acidité lui brûlait la gorge, il était cloué sur place, ne trouvait rien à redire qui pourrait contrer l'homme qui continuait à lui balancer des directives. Il avait perdu de sa superbe l'héritier, son visage était mortellement sérieux et seul son regard exprimait la rage qui l'animait. Émotion qu'il contenait tant bien que mal, son égaux l'empêchant de se ridiculer dans une répartie qui ne l'enfoncerait que davantage dans sa stupidité. Rage dirigée contre son interlocuteur bien sûr, mais aussi et surtout, contre lui-même. Frustré de ne pas avoir été à la hauteur et cela, dès la première heure du premier jour.

« Non. » répondit froidement le gamin qui souffrait toujours de la réprimande tout en lui emboîtant le pas, signalant qu'il se moquait bien de voir des corps dénués de vie ou en plusieurs morceaux. Ce qui n'était pas tout à fait vrai pourtant. Sirius n'avait été qu'une fois sur une scène de crime et il en avait mal dormi pendant plusieurs jours, les images revenant sous forme de flash dès lors qu'il fermait les yeux. Il s'était pour autant bien gardé de le dire à qui que ce soit et n'allait pas se confier à son tuteur, encore moins après la soufflante qu'il venait de se prendre.

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Maugrey s’attend à ce que la graine de Mangemort réplique, se braque, le prenne de haut. Lui et son sang-pur face à l’auror au sang-mêlé, l’homme dérangé, souillé. Il imagine spontanément le pire, si bien qu’il se retrouve un bon con quand le gamin décide d’en rester là. D’accepter la remontrance. La leçon.
Un bon point pour lui.
Ou peut-être que sa réaction vise à endormir sa méfiance. Maugrey ne se laisse pas attendrir si facilement. Il se contente d’un hochement de tête approbateur et continue de le guider jusqu’à l’entrée de chez Fleury & Bott. Malheureusement pour le mentor malgré lui, il ne pourra pas tester tout de suite la force de l’estomac du jeune Black puisque la découverte du morceau de corps date de plusieurs heures. Quelqu’un a rempli un rapport qui a atterrit sur son bureau pour enquête, l’oreille doit probablement trainer quelque part chez un mage spécialiste pour analyser. Y a-t-il seulement un corps à retrouver quelque part ? Maugrey l’espère et il prie surtout pour que ce soit celui d’un ennemi.
Il y a peu de chance.

Il pousse la porte de la librairie. Une clochette annonce son entrée. Autour d’eux, il n’y a pas trop de monde. En ces temps troublés, les sorciers ne sortent que par nécessité et même si la rentrée approche, il ne compte que trois clients plus deux libraires. Celui qui a découvert l’oreille tient le coup, derrière le comptoir. Il passe un chiffon sur la couverture d’un épais volume en cuir. Il passe, il repasse, il passe, il repasse, le regard perdu dans le vague.

C’est vous, Élias Byrne? interpelle Maugrey.

L’autre sursaute et acquiesce. Maugrey ne s’embarrasse pas de politesse, se présente en deux mots (littéralement) et pose des questions courtes, précises : où avez-vous exactement trouvé l’oreille ? À quelle heure ? Avez-vous remarqué un objet incongru autour ? Un objet normal ? Une personne ? Ses réponses ne correspondent pas à ce que contient le dossier. On lui a parlé de l’allée des embrumes mais il a découvert l’oreille devant Gringotts. Et que faisait-il là-bas ? Il allait déposer la recette du jour. Maugrey veut bien y croire. Il n’a rien remarqué si ce n’est cette oreille devant la première marche, qui se situe certes en face de l’allée des embrumes mais l’auror n’aime pas ce raccourci. Son affaire se transforme davantage en un message envoyé.

Mais si vous voulez mon avis, elle n’était pas humaine, cette oreille.
Comment ça, pas humaine ?

Il tend l’oreille (sans mauvais jeu de mots). Voilà un détail dont on ne l’avait pas –encore- informé.

Oui, elle était… Elle était un peu pointue et… Et…

Il pâlit. Maugrey se recule juste à temps pour ne recevoir aucune giclure de la bille acide qui dégouline sur le menton du libraire. Il se confond en excuse, s’essuie avec le chiffon dont il se servait pour nettoyer le livre et tremble.

Elle était longue ? Une oreille d’elfe ? Ou de gobelin ?

Le libraire acquiesce et Maugrey soupire. Il n’e tirera pas davantage. Ça l’inquiète, cette histoire. Le Ministère ne s’intéresse pas beaucoup à ce qui arrive aux espèces non-humaines mais ce n’est pas la première fois ces dernières semaines qu’il entend parler d’actes de ce genre. La majorité des gens se moquent qu’on retrouve des elfes de maison en pièces détachées. Lui, pas vraiment. Ça a une signification. Il ignore juste laquelle.

Il se contente d’un hochement de tête pour remercier le libraire et sort dans la rue avec le jeune Black. Il se dirige d’un pas rapide vers Gringotts. En chemin, il choisit de l’interroger :

Débriefing. Vas-y, épate moi.

Il ne le regarde même pas. Il continue d’avancer.
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Sirius Black  ϟ  Alastor Maugrey

S'il n'avait pas rougi pendant la tirade de son aîné, la soufflante avait du mal à passer. Partagé entre la honte et la frustration. Pourtant, il se force à ronger son frein. A se reprendre et rapidement, emboîte le pas à son supérieur, en silence. Il devait se méfier de lui à l'avenir. Compris cinq sur cinq. Le message ne pouvait être plus clair et frappant. Ah ça non. C'était l'effet d'une claque, le gamin en garderait la trace, sans l'ombre d'un doute. Il ne pose pas de question, peut-être aurait-il dû. Lui qui était si confiant en lui se trouvait si vite ébranlé par la prestance de l'Auror confirmé qui le précédait et le guidait droit vers Fleury&Bott.

Précis et concis, c'est que Sirius retiendra de ce bref échange entre les deux hommes. Alastor n'est clairement pas du genre à s'embarrasser du protocole social, qu'à peine son nom énoncé et son insigne d'Auror, il enchaîne les questions. Il va droit au but et Sirius se retrouve un peu plus frustré de la situation, constatant qu'en plus de lui avoir rabattu le caquet était un Auror des plus compétents. Il se tient bien droit le gamin, silencieux, déterminé à ne rien loupé de l'échange et surtout de faire ses preuves et racheter son image. Pourtant, alors que le vendeur se plie en deux pour vomir la seule glaire que contient son estomac, il ne peut empêcher son visage de s'étirer en une grimace de dégout.

Sirius se reprend néanmoins très vite et suit son tuteur qui tourne déjà les talons pour sortir de la boutique. Sans prendre même la peine de lui adresser un regard, Alastor le presse de lui donner son avis. Un test, ni plus ni moins. Sirius n'est pas dupe, mais cette fois, il compte bien faire bonne impression et montrer ce qu'il vaut. Son cerveau bouillonnaient d'idées sous ses cheveux bruns et pour une fois, il se força à se discipliner et organiser ses pensées. Sirius ne disposait d'aucune autre information que ce qu'il avait entendu, contrairement à Alastor qui devait avoir sans l'ombre d'un doute consulté ou au moins, survolé, un rapport avant de se rendre sur les lieux si bien qu'il était trop tôt pour avancer une quelconque théorie. C'était davantage des pistes de réflexion voir même des questions qu'il commença à avancer. « Déjà, il faudrait obtenir des clichés de l'oreille. Car une oreille d'elfe, c'est pas pareil qu'une oreille de Gobelin. Je ne pense pas qu'on obtiendra des informations quant à une disparition d'un elfe, étant donné à qui ils appartiennent, » continuait Sirius en ciblant intimement les sang-purs qu'ils considéraient presque tous comme des mangemorts. « mais on peut interroger les gobelins de Gringotts. Dans ce cas là, ça peut être un règlement de compte. » Sirius avait beau ne pas connaitre grand chose à propos des pratiques des Gobelins, il en savait suffisamment pour savoir que ces derniers avaient des pratiques très étrange et ne supportaient pas le vol au point de parfois se montrer violent.

Les mots que lui avait assené son mentor raisonnaient encore dans son esprit. Ne faire confiance à personne. Ca valait aussi pour les témoins non ? Désireux de montrer qu'il retenait la leçon, il avança presque timidement : « Il faudrait vérifier qu'il était bien là-bas pour déposer de l'argent, si quelqu'un l'a vu quitter la boutique. Après tout, ça pourrait être lui qui a déposé l'oreille pour ce qu'on en sait actuellement. C'est étrange qu'elle ait été déposée là sans que personne ne le voit avant. D'autant qu'il avait  l'air étrange ... » Le garçon laissa la fin de sa phrase en suspens, émettant l'idée qu'il puisse ne pas forcément être maitre de lui-même au moment des faits mais sous un sortilège.

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Maugrey donne l’impression de ne pas accorder la moindre attention à Sirius Black mais c’est tout le contraire. Il l’écoute, le jauge d’un regard grâce au reflet d’une vitrine, se fie à ce qu’il dégage. Le gamin commence par énoncer des évidences. Maugrey se satisfait quand même de l’entendre différencier les elfes des gobelins. Pour un sang-pur, c’était pas gagné et c’est à ce genre de détails qu’on différencie le bon grain de l’ivraie. Mais ça ne suffit pas à lever tout soupçon sur l’apprenti imposé de force. Il peut-être un peu plus malin que la moyenne.

Puis arrive sa dernière idée, son soupçon. Maugrey grommelle un assentiment, mâchonne un simulacre de sourire.

Bien. Ça rentre on dirait, t’as pas la tête si dure que ça.

Il s’agit d’un compliment bien que ça ne soit pas des plus clairs quand on ne connait pas Maugrey. Ou quand on est un être humain normal.

Du coup, là, on va poser quelques questions aux gobelins concernés. Ils n’aiment pas trop les humains, même ceux qui sont envoyés par le Ministère. Peut-être davantage ceux-là, d’ailleurs, vu qu’on les oblige à obéir à nos lois. Ils n’aiment rien plus que le secret bancaire. Enfin, si, l’or… Ça aurait été utile d’avoir un dossier complet avant de les rencontrer mais tu apprendras vite que si tu attends après ça pour travailler, tu ne bougeras pas souvent ton cul du bureau.

Il exagère un peu, sauf qu’il ne l’admettra jamais. Il manque surtout cruellement de patience et préfère s’adapter au lieu de patienter une demi-heure, le temps d’un aller et d’un retour. Il va la jouer au bluff. De toute manière, il est certain que les Gobelins ont observé l’oreille avant l’arrivée des agents du Ministère. En fonction de qui il interrogera, il réussira à obtenir une réponse certaine : Elfe ou Gobelin ? Règlement de compte au sein d’une race ou exemple pour avoir contrarié le mauvais Mangemort ? Maugrey ne peut pas exclure cette possibilité.

T’as déjà parlé avec un gobelin ? Pour autre chose que descendre à ton coffre, j’veux dire. Ou à un elfe de maison ? Pour autre chose que de lui donner un ordre ?

Aucun jugement dans sa voix. Ça ressemble surtout au début d’une autre leçon. Il attend quand même sa réponse sur le parvis de la banque, se tournant vers lui. Il le regarde même de ses yeux gris orage, sans rien laisser paraître.
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Sirius Black  ϟ  Alastor Maugrey

Réaction corporelle trop rapide pour être réprimée, la mâchoire de Sirius se crispe, plissant ses lèvres jusqu'à les étirer en une fine ligne alors qu'Alastor lui envoie une petite pique. Phrase qui pourrait être anodine dans la bouche d'un autre, comme l'un de ses meilleurs amis, taquine même, mais rappel douloureux pour Sirius qui avait commencé sa première mission sur le terrain brutalement. Le gamin ignore s'il doit s'en sentir flatté ou vexé. D'un côté, il reconnaissait qu'il n'y avait pas que des conneries dans son propos et Sirius décida de s'en contenter pour l'instant, bien décidé à redorer son blason et montrer à son tuteur ce qu'il valait vraiment.

Il hochait de la tête à la tirade de Maugrey, ne pouvant faire grand-chose d'autre par ailleurs. Contester ses instructions auraient été pire que malvenu. Il allait répondre à la question, mais à peine ouvrait-il la bouche, que son supérieur enchaînait, coupa la parole qu'il n'avait pas encore prise. Et c'était une aubaine pour Sirius qui s'apprêtait à répondre par l'affirmative alors qu'en réalité, non, il n'avait jamais échangé avec ce peuple que dans le but d'accéder au compte de son oncle Alphard, le sien ayant été bloqué et vidé par ses parents peu après sa fugue. Enfin, c'était devenu son compte à présent, son nom figurant sur les papiers officiels.

« Non, » commença le garçon alors que son mentor s'arrêtait juste avant de gravir les marches qui menaient à la banque des sorciers. « Enfin, j'ai bien été convoqué, pour prendre possession de mon héritage suite au décès de mon oncle, et j'ai discuté avec les quelques Gobelins qui m'accompagnaient pour faire l'inventaire du coffre en question et nous avons discuté de quelques objets qui se trouvaient dans la masse, mais on s'en fiche non ? Enfin ça compte pas je suppose. Pour les elfes, non jamais. Je n'aimais pas l'elfe que j'ai côtoyé petit et il me le rendait bien. J'avais aucune envie de lui parler. » Terminait le garçon en évitant de prononcer les mots familles et parents. Il se sentait presque bête de répondre par deux fois la négative et ne pu s'empêcher de penser qu'il allait à nouveau décevoir son mentor, pourtant, il garda ses yeux gris acier rivé dans ceux d'Alastor, attendant sa répartie cinglante qui ne manquerait surement pas d'arriver sous forme de moquerie.

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